Je suis assez abasourdi par ce que je lis...
Qu'on l'aime ou pas (je l'aime pas), Flash s'est imposé comme plugin "presque standard" de manière honnête. Il a répondu à de nombreux besoins, dont celui de "ça marche partout ou presque". Qu'il soit buggué et fermé c'est bien dommage et il faut travailler à le supprimer des navigateurs.
Ce n'est pas en l'excluant (c'est-à-dire en utilisant des parts de marché pour éliminer un concurrent), mais bien en lui proposant une alternative crédible.
Je navigue avec le Flash bloqué par défaut, ce qui me permet de voir ce à quoi il est utilisé. Outre les publicités animées et quelques jeux de plus en plus nombreux qui remplacent les petits jeux que plein de gens installaient sur leurs ordis, il était pas mal utilisé pour les menus déroulant il y a 4-5 ans. Or, cet usage à fortement diminué (alors même que le taux de pénétration de Flash a augmenté).
Pourquoi a-t-il diminué? Parce que, comme pour l'utilisation de javascript pour un menu (ce qui m'horripile), il est aujourd'hui possible de faire de jolis menus en HTML/CSS qui marchent partout. Et l'arrivée des Transitions et des Animations va encore le rendre moins utile!
Ce n'est pas en l'excluant (c'est-à-dire en utilisant des parts de marché pour exclure un concurrent), que l'on doit arriver à le rendre inutile, caduc. C'est en proposant des alternative crédibles pour ses autres fonctions principales:
- la vidéo (une balise <video> crédible (i.e. interopérable et gratuit) fera disparaître cette utilisation de Flash très rapidement, surtout qu'il y possible de faire un "fallback" discret et simple pendant la phase de transition. La fin de la guerre des codecs entraînera une disparition rapide de l'utilisation du Flash pour la vidéo, à condition que la performance et la consommation de ressources soient suffisamment optimisées;
- les jeux: de plus en plus de jeux JS apparaissent. N'oublions pas que ActionScript est de l'ECMAScript mais sur d'autres objets. Les performances du JS ne sont pas en cause, mais bien plus la possibilité de manipuler des objets complexes et les possibilités de l'HTML/CSS. Là aussi les progrès des dernières années, s'ils continuent, permettra de rendre la dépendance des sites de jeux au Flash plus faible;
- la pub animée: là la demande ne vient pas des utilisateurs mais des webmasters. Si Flash baisse en parts de marché, ils s'adapteront, ils ne peuvent se permettre de payer pour de la pub qui ne serait vue que par 60-70% des utilisateurs!
Et c'est tout: la plupart des autres utilisations sont des webapps et là, ceux qui en auront besoin, pourront toujours installer Flash. Les webapps concurrentes gagnent peu à peu en puissance (toujours le triplet HTML-CSS-JS de plus en plus performant) et il arrivera un moment où il sera plus simple de proposer une version sans Flash (qui nécessite une installation particulière). On le voit avec la difficulté à Silverlight, qui occupe quasiment exclusivement le domaine des webapps, à s'imposer, malgré la puissance de Microsoft).
Ce n'est pas en l'excluant (c'est-à-dire en utilisant des parts de marché pour exclure un concurrent), que l'on doit s'en débarrasser. C'est contraire aux principes que défend Mozilla, la liberté de choix. Comme toutes les libertés, il faut être très prudent lorsqu'on les limite. Longtemps, aucune limitation sur les plugins et les dll chargées dans Firefox n'ont eu lieu. Ce n'est plus le cas, car cela entraînait des problèmes de stabilité (et de sécurité). Aussi Mozilla a mis en place trois mécanismes:
1) Des blocklists permettant de limiter l'impact de certains composants binaires. Ces listes de blocages sont utilisées le moins possible: des anciennes versions pas sûres bloquées avec l'accord de leur éditeur lorsqu'une version récente corrige le problème, des malwares connus, ... Avec toujours la possibilité, certes pas trivial, de configurer Firefox pour ignorer un blocage (quelques personnes l'ont utilisées pour utiliser des anciennes versions de Quicktim par exemple).
2) La possibilité de vérifier simplement, et de mettre à jour simplement, les plugins afin de permettre d'avoir les derniers bugfix
3) Les OOP-plugins qui isoleront bientôt les plugins, améliorant la stabilité du navigateur et permettant à l'utilisateur de prendre conscience des problèmes de stabilité posés par certains plugins, comme le Flash.
Ce troisième point va entraîner deux choses: tout d'abord, il va motiver certaines personnes à se débarrasser de Flash dès que c'est possible; ensuite, il forcera Adobe a améliorer la stabilité du plugin (et un serveur de signatures, comme celui que Microsoft fournit pour Silverlight, serait déjà un progrès dans la stabilisation de Flash)
En résumé,
exclure le Flash n'est pas la bonne solution car:
- c'est contraire au principe de libre-choix de l'utilisateur; on n'est pas Apple ou Microsoft! N'utilisons une position dominante pour éliminer les concurrents, jouons fair-play;
- Flash est un concurrent et la concurrence c'est bien: je veux lire de la vidéo de manière plus performante sans Flash et pas de manière moins efficace, juste pour avoir le plaisir de m'en passer;
- L'instabilité de Flash permet à Firefox de modifier son architecture de plugins pour être plus résistant! (D'accord c'est pas un très bon argument, mais c'est pas pour me déplaire que c'est son instabilité qui a forcé Mozilla a attaquer le problème des composants binaires dans Firefox!)
- Flash a aujourd'hui des utilisations "légitimes" (webapps) et une pression concurrentielle sur lui le forcera à s'améliorer (perf, stabilité, sécurité) s'il veut survivre. Et c'est bon pour ses utilisateurs...
- Si on bannit le Flash (en supposant que Firefox aie cette capacité d'influencer le marché, ce qui est loin d'être sûr), sans alternative crédible dans le navigateur lui-même, c'est Silverlight qui prendra la relève. Et pas sûr qu'on ait gagné au change.
Par contre, oui il faut lutter contre lui, en fournissant un (des!) navigateur qui réponde mieux aux besoins des utilisateurs.
La liberté n'est jamais accordée de bon gré par l'oppresseur; elle doit être exigée par l'opprimé (Martin Luther King).
Les convictions sont des ennemis de la vérité plus dangereux que les mensonges. (Nietzsche).
Native Mozillian.